Un dicton oriental dit : « Si vous voulez du bonheur pendant une heure, faites une sieste. Si vous voulez du bonheur pour une journée, allez pêcher. Si vous voulez du bonheur pendant un an, héritez d’une fortune. Si vous voulez le bonheur pour toute la vie, partagez avec autrui ». Depuis des siècles, les plus grands penseurs ont suggéré la même chose : le bonheur se trouve dans le don de soi et le partage. Et si c’était vrai… ?
Quel mot magnifique que celui de « partage » ! Mais à force d’être utilisé, on peut se demander ce qu’il signifie en réalité. De l’étymologie aux usages les plus récents, les dictionnaires lui attribuent huit significations différentes, parfois opposées.
Si l’on encode le mot dans un moteur de recherche, la première des notions qui apparait est celle du don et de la solidarité. C’est justement la plus belle des huit définitions !
Le partage est donc l’action de donner une part de quelque chose à quelqu’un, que cette ‘chose’ soit matérielle ou immatérielle. Pour certains, c’est même une valeur spirituelle clef. Pour d’autres encore, comme les ‘permaculteurs’, c’est une éthique de Vie.
Cette notion de partage fait en effet partie des « trois éthiques de la Permaculture » : Prendre soin de la Terre – Prendre soin de l’Humain – Partager Équitablement [1].
A l’échelle globale, nous sommes malheureusement encore très loin de cette 3ème éthique qui, bien au-delà de la permaculture, garantit pourtant l’équilibre de tout système.
Partage passif, partage actif
Evidemment, dans l’expression du don et du partage, il y a une infinité de nuances et de niveaux d’investissement. Nous pouvons partager passivement, rapidement, sans trop ‘donner de notre personne’. On peut aussi y mettre tout son cœur jusqu’au don de soi le plus pur.
Prenons l’exemple des arbres fruitiers. Au moment de la récolte, ils produisent souvent beaucoup plus que ce qu’une personne ou une famille ne peut consommer. Il serait donc naturel de partager ce dont on ne sait rien faire. C’est le partage passif. Comme il n’exige ni ne coûte rien, il devrait être la norme.
Nous pouvons également choisir de transformer les fruits en confitures, conserves, sirops et autres alcools de fruits et en offrir une partie. C’est toujours du partage, mais davantage actif, car nous avons donné de notre temps et chaque produit offert peut devenir un véritable présent.
A l’automne, on peut couper des petites branches et en faire des boutures qui donneront autant d’arbres fruitiers par multiplication. Arbres que nous pouvons donner ou même proposer d’aller replanter dans les jardins de nos familles, chez nos amis ou chez des voisins ; cela peut même devenir une activité de quartier conviviale et festive... jusqu’à la création d’une association régionale ou nationale qui distribue gratuitement des myriades de fruitiers pour ré-enchanter la Terre...
C’est toujours du partage, mais on peut voir que le degré d’investissement est de plus en plus grand. La seule limite est l’imagination !
Science et bon sens
Se pourrait-il que le degré de satisfaction ressentie soit proportionnel à l’investissement, au degré de partage et de don de soi ? La réponse est oui !
Même si cette idée va à l’encontre de la pensée dominante selon laquelle tout comportement généreux représente un coût pour l’individu, de nombreuses études démontrent le lien étroit entre partage, don de soi et bonheur.
Jacques Lecomte, chercheur en psychologie et auteur d’un essai sur le sujet [2], souligne que : « beaucoup de travaux en psychologie montrent les liens entre générosité et bonheur. Ainsi, en 2010, une enquête menée dans 136 pays, avec une moyenne de plus de 1300 personnes par pays, a identifi é une corrélation positive entre le don et le bien-être dans 122 pays ! ».
Plus récemment, une étude d’une équipe internationale de neurobiologistes des Universités de Lübeck (Allemagne), Chicago et Zurich démontre que la relation entre générosité et sensation de bonheur s’observe aussi dans le cerveau. Grâce à la technologie IRM, nous savons maintenant que le partage et le don de soi activent les mêmes zones du cer-veau qui sont stimulées par les expériences agréables que l’on cherche à reproduire.
Une fois de plus, la recherche scientifi que rejoint naturellement le bon sens et démontre que la générosité, le partage et le don sont une voie puissante vers le bonheur durable. Un bonheur où épanouissement personnel et interpersonnel sont étroitement liés.
Ainsi, dans la « société du sans contact » qui se profile, la distance sociale et l’isolement nous poussent à dématérialiser nos relations. Or, il ne faut pas confondre l’illusion de l’hyper-connectivité avec le lien véritable. Maintenant, plus que jamais, il est indispensable de sortir de nos zones de confort, de quitter nos claviers afin de créer du lien et oser le partage ‘en vrai’. Le seul risque encouru est… un bonheur plus grand.
[1] D’autres formulations de ce 3ème principe apparaissent régulièrement dans les ouvrages
spécialisés : « Trouver sa juste part », « Redistribuer les surplus » ou encore « Donner avec
justesse ».
[2] « Bonté humaine : altruisme, empathie, générosité » de Jacques Lecomte chez Odile Jacob.
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